COVID-19 et libertés publiques / Rétablissements des contrôles aux frontières intérieures en Europe … jusqu’au 30 octobre 2020…

Guide d’autodéfense juridique
en temps de confinement :

guide_confinement_v1 PV, violences policiéres

le 19/4/2020, par la Legal Team de Marseille


Point Droit : Confinement

Avril 2020, par LDH, SAF, Observatoire parisien des libertés publiques
Contact : contact@obs-paris.org

Télécharger : Point droit – confinement


Contrôle d’attestation de sortie :
ce que ne peuvent pas faire
les forces de l’ordre


Pas de confinement pour les libertés publiques !

Observatoire parisien des libertés publiques SAF LDH

Dans le cadre de la pandémie de Covid-19 qui sévit actuellement dans de très nombreux pays, les autorités françaises ont décidé de mettre en œuvre, à compter du 17 mars 2020, des mesures de confinement strictes afin de limiter les déplacements jugés non-essentiels. Face à la propagation rapide du virus, nul ne saurait contester la nécessité d’adopter des mesures à la hauteur de l’enjeu sanitaire. L’exceptionnelle gravité de la situation sanitaire ne saurait cependant justifier des restrictions arbitraires et disproportionnées aux libertés publiques. L’Observatoire parisien des libertés publiques s’inquiète à ce titre de l’imprécision entourant les missions confiées aux forces de l’ordre dans le cadre du contrôle des déplacements quotidiens. Afin de lutter contre la pandémie de manière juste et sereine, il appartient aux autorités publiques de définir clairement le cadre légal entourant les interventions des forces de l’ordre. La mise en œuvre de sanctions à l’encontre des personnes qui ne respecteraient pas les règles en vigueur ne saurait en effet contrevenir à l’exigence de justice, de discernement, de proportionnalité. Il en va tant de la légitimité de mesures adoptées dans l’urgence que de leur compréhension et de leur respect par tout citoyen. L’Observatoire fera preuve de vigilance, durant toute la période de confinement, vis-à-vis des méthodes employées par les forces de l’ordre lors du contrôle des interdictions de circuler. La gravité de la situation ne saurait justifier des interventions illégitimes, discriminatoires ou disproportionnées de la police ou de la gendarmerie, dans le cadre des missions spécifiques qui leur sont actuellement dévolues. Il convient de rappeler à cet égard que le droit de filmer les forces de l’ordre dans l’exercice de leurs fonctions, conformément aux prescriptions de la commission de Venise et à celles de la circulaire du 23 décembre 2008, demeure pleinement d’actualité et ne saurait être remis en cause par le caractère exceptionnel de la situation sanitaire en cours. Ce droit participe au contrôle citoyen des pratiques policières et à la transparence de toute intervention dans le champ des libertés publiques. L’Observatoire s’étonne enfin qu’au premier jour de confinement, le Préfet de police de Paris ait tenu des propos relevant davantage d’une logique de répression que d’une volonté d’apaisement et de résilience. De telles déclarations publiques, tenues par un haut fonctionnaire, sont susceptibles d’attiser inutilement les tensions et d’installer des logiques conflictuelles contre-productives entre les autorités et la population.

Dès lors, citoyens, citoyennes ; voisins, voisines, restons vigilants et solidaires face aux événements qui nous entourent et aux risques qu’ils comportent !

Si vous avez connaissance de pratiques abusives de la part des forces de l’ordre dans le cadre de la crise sanitaire, vous pouvez nous envoyer vos photos, vidéos ou témoignages à l’adresse suivante :
contact@obs-paris.org

Pour nous suivre : @ObsParisien facebook.com/obsparisien

http://site.ldh-france.org/paris/observatoires-pratiques-policieres-de-ldh


Contre le COVID-19, la géolocalisation déjà autorisée

Posted on 19 mars 2020

https://www.laquadrature.net/2020/03/19/contre-le-covid-19-la-geolocalisation-deja-autorisee/

Face au COVID-19, de nombreux États annoncent leur intention de recueillir massivement des données de géolocalisation auprès des opérateurs de communication. En Chine, aux États-Unis, en Italie, en Israël, en Corée du Sud, en Belgique. En dépit d’un amendement scélérat proposé par l’opposition, une telle ambition est pour l’heure absente du projet de loi français dédié à l’épidémie, actuellement débattu au Parlement. Et pour cause : depuis 2015, la loi renseignement semble déjà autoriser de telles mesures. L’an dernier, nous avons attaqué cette loi devant le juge de l’Union Européenne, dont nous attendons bientôt la décision. Prenons ici un moment pour en rappeler les dangers.
La loi renseignement adoptée en 2015 permet à l’État de surveiller la population pour une très large variété de finalités, notamment « pour le recueil des renseignements relatifs à la défense [des] intérêts économiques, industriels et scientifiques majeurs de la France ». Si, comme Emmanuel Macron, on admet facilement que « cette crise sanitaire sans précédent aura des conséquences […] économiques majeures », il faut conclure que la loi renseignement autorise déjà l’État à surveiller la population afin de lutter contre l’épidémie. Rien de surprenant au regard de la démesure des pouvoirs que lui a conférés le Parlement en 2015.

Parmi les mesures autorisées par la loi renseignement, l’article L851-1 du code de la sécurité intérieure prévoit que les services de renseignement peuvent exiger la transmission par les opérateurs téléphoniques des « données techniques relatives […] à la localisation des équipements terminaux utilisés » par leurs clients. En application de l’article L851-4, ces données peuvent même être « recueillies sur sollicitation du réseau et transmises en temps réel par les opérateurs ». Pour exiger ces transferts, l’administration agit seule, sans le contrôle ou l’autorisation préalable d’un juge.

L’État n’informe jamais la population quant à la façon dont il utilise concrètement la loi renseignement, celle-ci organisant une totale opacité. Nous n’avons à ce stade aucune information permettant de corroborer l’utilisation de ces pouvoirs de surveillance dans le cadre de la lutte contre l’épidémie du virus COVID-19. Mais, en droit, rien n’interdit à l’État d’user de ces pouvoirs, par exemple, pour identifier les personnes se déplaçant de villes en villes ou ayant visité certains lieux sensibles, voire pour s’assurer que les injonctions de confinement soient suffisamment respectées1.

Si, aujourd’hui, l’administration utilisait la loi de 2015 en ce sens, serait-ce conforme au règlement général sur la protection des données (RGPD) ? En théorie, les données sensibles, telles que les données de santé que révélerait une telle surveillance (par exemple le fait que, en raison de ses déplacements, une personne présente un haut risque d’avoir contracté le virus), peuvent bien être traitées « pour des motifs d’intérêt public dans le domaine de la santé publique ».

À condition toutefois de respecter le reste du RGPD, ce qui n’est pas du tout le cas de la loi renseignement : une fois ces données collectées, cette loi laisse l’administration les ré-utiliser ensuite pour des finalités étrangères à la lutte contre l’épidémie (fichage politique, lutte contre la fraude, etc.). Si l’article L822-2 du code de la sécurité intérieure impose une suppression des données brutes de localisation au bout de 4 ans, il n’en est rien pour les « fiches » constituées sur la base de ces données : ni la durée de conservation, ni l’utilisation ultérieure de ces fiches n’est limitée. Cette violation du droit européen est une de nos principales critiques contre le texte dans notre affaire devant la Cour de justice de l’Union européenne – dont la décision devrait être rendue dans les mois à venir.

Dans cette situation de crise, en dépit des pressions politiques, le gouvernement doit résister à toute fuite-en-avant sécuritaire. Face au risque d’abus engendré par les pouvoirs démesurés que confère d’ores-et-déjà la loi renseignement à l’État, il doit également s’engager à faire immédiatement la transparence sur toutes les mesures de surveillance de la population mises en œuvre pour lutter contre la propagation du COVID-19. En attendant que les pouvoirs exorbitants que lui octroie la loi renseignement soient battus en brèche.

Références

1. ↑ L’article L821-2 du code de la sécurité intérieure prévoit que le Premier ministre autorise la mise en œuvre des techniques de renseignement à l’encontre de une ou plusieurs personnes qui, lorsque leur nom n’est pas déjà connu, sont « désignées par leurs identifiants ou leur qualité ». Aucun contingent ne limite le nombre de personnes pouvant être géolocalisées en même temps. Le notion de « qualité » des personnes surveillées est si large et indéfinie qu’il faut redouter quelle soit utilisée pour viser des caractéristiques générales telles « a fréquenté tel lieu » ou « a voyagé entre telle ville et telle ville à telle date ». S’agissant des personnes dont le nom est déjà connu des pouvoirs publics, telles que les malades dépistés, l’autorisation du Premier ministre pourrait les viser plus directement, par exemple pour surveiller leurs déplacements.
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Information sur les divers rétablissements des contrôles
aux frontières intérieures en Europe